dimanche 28 novembre 2010

Sécurité publique vs sécurité privée

Selon une dépêche AFP du 27 novembre signée  Cyril Touaux"à l'heure des réductions d'effectifs dans la police et la gendarmerie, les sociétés de sécurité privée sont en pleine expansion, faisant craindre à certains une privatisation rampante de la sécurité". Ce débat sur le partage public-privé en matière de sécurité est intéressant car il touche jusqu'aux fondements de la notion même d'État et de la proportion dans laquelle peut se déléguer son monopole de l'usage légitime de la violence pour reprendre l'expression de Max Weber.

Le but des sociétés privées "n'est pas l'intérêt général", mais "de faire de l'argent", regrette Nicolas Comte, le secrétaire général d'USGP-Force ouvrière Police, qui craint un un "partage territorial entre la police et les sociétés privés". Bien sûr, le souci de l'intérêt général n'est pas du côté du privé. Faut-il pour autant s'interdire toute réflexion sur le partage public-privé en se limitant à ce seul critère de l'intérêt général ? Le privé est quant à lui soumis à l'impératif d'efficacité ou de rentabilité qui est tout aussi important et pas forcément antinomique de l'intérêt général. Le service public, quant à lui, n'est pas non plus la garantie infaillible de l'intérêt général maximal. Si son efficacité s'avérait faible voire nulle, l'intérêt général ne s'y retrouverait plus, et ce serait plutôt l'intérêt particulier de fonctionnaires sous-employés voire inutiles qui prévaudrait alors.


Selon le syndicat Alliance, second syndicat de gardiens de la paix, très favorable quant à lui à cette coproduction public-privé, il faut "recentrer les policiers et les gendarmes sur leur coeur de métier", à savoir "sécurité publique, ordre public, police judiciaire et renseignement", et "transférer" les "autres missions" à "d'autres acteurs de la sécurité". Là réside probablement le critère de choix entre public et privé, qui laisserait au public la sécurité du domaine public, et déléguerait au privé celle concernant le domaine privé. Le critère semble assez logique et simple à appliquer pour ce qui concerne la "sécurité publique" et "l'ordre public", et l'est tout autant pour tout ce qui touche à la "chose" judiciaire, domaine incontestablement régalien. 


Concernant le renseignement, le critère reste parfaitement applicable et particulièrement important à prendre en compte, à condition de bien préciser qu'il s'agit là de renseignement de sécurité. Cela va d'ailleurs sans dire puisque le renseignement de sécurité ou renseignement d'intérêt criminel donc judiciaire relève en réalité de la chose judiciaire. Le renseignement de sécurité relève du domaine régalien et ne peut en aucun cas se déléguer à des acteurs privés


Cet impératif ne concerne pourtant en rien, le "renseignement d'entreprise", renseignement que la langue de bois officielle préfère ignorer, mais dont la réalité concrète ne se retrouve pas plus dans le vocable "veille" que dans celui d''intelligence économique". Le renseignement d'entreprise, qui n'a rien à voir avec le renseignement de sécurité, est au service de la stratégie d'entreprise qui ne relève que de l'entreprise et donc du secteur privé si celle-ci relève du secteur privé.


Cette observation est essentielle, car elle implique impérativement de bien marquer la différence dans l'entreprise entre sécurité et renseignement. L'entreprise est en effet en charge de sa sécurité privée, qui s'applique sur l'ensemble de son emprise privée au sein de laquelle la sécurité publique n'a pas vocation à intervenir. Le renseignement qui ne devrait intervenir en matière de sécurité que dans le cadre d'affaires judiciaires n'y a normalement pas sa place. 


FB

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