dimanche 9 janvier 2011

Espionnage industriel ou intelligence économique ?

L'intitulé d'un entretien avec Frédéric Saffroy, publié le 7 janvier 2010 par le blog EasyBourse et réalisé par par Nabil Bourassi, est révélateur de la confusion qui règne entre intelligence économique et espionnage industriel. La suite de l'interview confirme cette confusion, comme bien d'autres articles de réaction à l'affaire Renault en témoignent dans l'actualité.


À force de confondre, l'impératif de sécurité inhérent à toute activité stratégique, avec la fonction renseignement ou intelligence économique (exploitation de l'information utile aux acteurs économiques selon la définition du rapport Martre), on en vient tout naturellement à réduire ainsi l'intelligence économique à une activité de protection du patrimoine concurrentiel face aux menaces d'espionnage industriel, que les entreprises doivent apprendre à affronter avec plus de vigilance.

Ce qui n'est dans le titre qu'une simple réduction de la fonction à l'une des conditions de sa réalisation, se transforme à la lecture de l'article en une véritable confusion qui, au fil des questions posées, fait de l'intelligence économique et de l'espionnage industriel deux notions parfaitement interchangeables. En témoigne cette dernière question qui, cherchant à déterminer quels sont les secteurs économiques les plus touchés par l'espionnage industriel, se trouve ainsi formulée : "Y a-t-il des secteurs privilégiés par l’intelligence économique ?".

On peut voir dans cet exemple (l'actualité récente nous en donne encore bien d'autres)* une manifestation de ce délitement de l'intelligence économique observé dans mon billet précédent, qui l'éloigne peu à peu de l'exploitation de l'information utile (recherche, traitement et distribution), activité pourtant essentielle de la fonction selon le rapport Martre, en confondant l'impératif de sécurité avec la fonction elle-même, jusqu'à en faire un des trois piliers de la discipline.

FB

(*) Eric Besson, ministre de l'Industrie, de l'Énergie et de l'Économie numérique, invité de RTL le 6 janvier 2010, à propos de l'affaire d'espionnage chez Renault : "elle illustre une nouvelle fois les risques pour nos entreprises en matière d'espionnage industriel, d'intelligence économique comme on dit aujourd'hui". Comment penser que l'amalgame entre "intelligence économique" et "espionnage industriel" puisse ne pas être totalement banalisé, lorsque le ministre lui même fait la confusion ?
Comment éviter dans ces conditions qu'un quotidien régional publie en première page un article débutant ainsi : "L'intelligence économique ou espionnage industriel ..."  (Hubert Besson,  Intelligence économique : ces entreprises de l'Yonne sous haute surveillance, L'Yonne Républicaine édition du 11 janvier 2010) ?  

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