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La communication à l’honneur pour la prévention par l’information plutôt que le secret pour l’intervention par le feu
Avec la révolution industrielle, le feu est entré au cœur de toute problématique concernant la sécurité des nations. La puissance de feu devenait alors le facteur stratégique déterminant en matière de politique de défense. Avec la révolution numérique, l’information revient au cœur des problématiques sécuritaires. La maîtrise de l’information remplace la puissance de feu comme facteur stratégique déterminant en matière de politique de sécurité nationale. L’intervention par le feu (l'affrontement armé) cède le pas à la prévention par l’information (le renseignement) et, de la même manière que la mobilité au combat s’est imposée naguère au détriment du retranchement, la communication en matière de renseignement s’impose désormais au détriment du secret.
En matière de stratégie, la communication est à la
prévention, qui s’impose comme une fonction majeure au 21ème siècle,
ce que la mobilité était à l’intervention qui a dominé le 20ème
siècle. Elle doit remplacer le secret comme la mobilité a remplacé les lignes
de tranchées. À l’ère des réseaux numériques et de la communication la guerre
de l’information prend le pas sur la guerre secrète, comme la guerre de
mouvement a pris le pas naguère sur la guerre de positions à l’ère des engins
motorisés et de la mobilité. Face à une augmentation de la puissance de feu
terrifiante, l’intervention qui était le mode de règlement naturel des
contentieux entre nations à l’ère industrielle s’est figée dans une guerre de
positions avant de renouer avec la mobilité et le succès grâce à la motorisation
du champ de bataille. La prévention s’est ensuite lentement imposée en lieu et
place de l’intervention devenue trop coûteuse en vies humaines. Après s’être
figée dans une guerre secrète dite "froide" comme l’intervention
s’était figée dans la guerre de positions, elle doit désormais être capable, à
l’ère de l’information, de renouer avec la communication et le succès grâce à la
numérisation du "champ de bataille".
Tout comme la guerre de tranchées a dû céder le pas
après le premier conflit mondial à une guerre de mouvement avec la motorisation
du champ de bataille, la guerre secrète qui était la marque de fabrique de la
guerre froide doit désormais céder le pas, avec la numérisation du "champ
de bataille", à la maîtrise de l’information. Alors que la connaissance et
l'anticipation sont les facteurs déterminants d’une stratégie désormais nécessairement
plus préventive que destructrice, la fluidité des communications comme naguère
la mobilité, devient une capacité essentielle. L’exploitation du renseignement,
dont les savoir-faire anciens bien rodés par l’exercice d’une longue pratique
sont entièrement consacrés à la maîtrise de l’information (acquisition des
signaux, traitement des données, capitalisation des connaissances, diffusion
des savoirs), peut être le fer de lance du changement de paradigme stratégique
en cours, à condition qu’elle soit capable de s’adapter à la révolution
numérique actuelle qui bouleverse en particulier nos modes de communication.
La dissuasion pour la défense de nos intérêts vitaux,
et plus généralement la prévention pour le concept plus large de sécurité
nationale sont désormais en première ligne, alors que le combat pour le
contrôle du territoire (guerre de conquête ou lutte contre les invasions) a
définitivement montré son inadéquation aux enjeux de la sécurité nationale. La
puissance de feu devient l'ultime recours, tandis que la connaissance, et le
renseignement dont elle procède, sont les principaux atouts de succès des armes
dont l'usage doit demeurer dans toute la mesure du possible plus persuasif ou
dissuasif qu'effectif.
A l'ère industrielle, le renseignement n'était qu'une
fonction auxiliaire, dans un mode d'action fondé sur l'intervention et la
puissance de feu. C'était une fonction de l'ombre. Un bon coup d'œil valant
mieux qu'une mauvaise impasse, il s'agissait de voir sans être vu pour connaître
l'ennemi, déceler ses secrets et tenter d'avoir toujours un coup d'avance sur
lui (anticipation). A l'ère de l'information, dans un mode d'action reposant
sur la prévention, il devient une fonction stratégique majeure.
Face à une terrible augmentation de la puissance de
feu clouant au sol les armées contraintes de s'enterrer, la motorisation et le
blindage ont permis, à l’ère industrielle, de renouer avec la guerre de
mouvement seule garante d'une victoire rapide et économe en vies humaines comme
en moyens matériels. Alors que le cheval était supplanté par le moteur, la
cavalerie a su se transformer en arme blindée mettant à profit son expertise de
la mobilité, malheureusement avec un retard sur l'Allemagne qui nous a été
fatal en 1940.
De la même manière, à l’ère de l’information, face à
une formidable augmentation des flux d’information submergeant le renseignement
contraint de s’enfermer dans le secret, la numérisation et l’organisation des
connaissances partagées en réseau doivent permettre de renouer avec la maîtrise
de l’information, seule capable d'autoriser la victoire sans combat. Alors que le
papier est supplanté par l’ordinateur, l’exploitation du renseignement, mettant
à profit son expertise du renseignement de documentation et de sa diffusion
grâce à sa maîtrise du cycle de l’information (acquisition, traitement,
capitalisation, diffusion) doit savoir se transformer au plus vite en véritable
service de renseignement numérique. C’est seulement ainsi que le renseignement,
organisé pour anticiper et éclairer efficacement une stratégie redevenue
résolument préventive, peut nous permettre d’éviter d’être à nouveau en retard
d’une guerre.
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