jeudi 10 juin 2010

Olivier Buquen, délégué interministériel à l'intelligence économique : « nous ne sommes pas un service de renseignement »

Dans un article intitulé "Vu d’en haut par Olivier Buquen, délégué interministériel à l'intelligence économique(lenouveleconomiste.fr du 1 juin 2010)Julien Tarby donne la parole à Olivier Buquen pour nous présenter sa mission. Celui-ci dénonce le « vrai point faible français », qui serait « la protection de l'information », mais aborde néanmoins le volet « offensif » de l'IE qu'il présente comme « tout ce qui lui permet de récupérer les informations ». Cette présentation de la fonction "intelligence économique" appelle quelques commentaires.

On peut s'interroger en effet sur la pertinence de l'expression « IE offensive » pour désigner « tout ce qui lui permet de récupérer les informations ». Le fait de chercher à « récupérer des informations » serait considéré comme une action « offensive », soit une attaque ou une agression, littéralement une offense. Difficile dans ces conditions d'éviter que l'IE soit assimilée à de l'espionnage.
  
A propos de la raison d'être de sa délégation, Olivier Buquen précise : « nous ne sommes pas un service de renseignement ». Cela va de soi, puisqu’il s’agirait alors de "renseignement économique" pratiqué par un service de l’État, et donc susceptible d’avoir recours, comme tous les "services de renseignement" du monde, à l’espionnage. Mais, à force de répéter de tribune en tribune que l’intelligence économique n’a rien à voir avec les "services de renseignement", on finit par éveiller la méfiance, surtout lorsqu’on parle en même temps de « missions "offensives" ». D’où l’intérêt qu’il y aurait à utiliser un vocabulaire plus clair.

On nous parle ici de politique industrielle qui est normalement du ressort d’un ministère de l’industrie, chargé de veiller à « la création et/ou à la préservation de l’emploi sur le territoire français » ainsi qu’à « la compétitivité » des entreprises françaises « en France et à l’international », ceci en étroite collaboration avec les ministères en charge de notre sécurité (Intérieur, Justice, Défense) et de nos relations internationales (Affaires étrangères). S’il y a besoin d’une « délégation interministérielle », chargée de créer, d’améliorer ou de faciliter cette synergie entre ministères, avec pour « finalité », « la création et/ou la préservation de l’emploi sur le territoire français ; puis la compétitivité de nos entreprises en France et à l’international », pour assurer cette mission, pourquoi ne pas désigner cette dernière d’un terme plus compréhensible par le commun des mortels qu’intelligence économique (par exemple "développement et sécurité économique") ?

Cela permettrait aux entreprises de parler de "renseignement d’entreprise", pratiqué par les entreprises et seulement par elles, sans qu’il y ait d’ambiguïté possible avec de quelconques "services de renseignement" et certaines de leurs activités clandestines qui sont l’apanage des États. Ce "renseignement d’entreprise" n’a rien à voir par ailleurs avec les "services de sécurité" privés chargés d’assurer la protection des biens matériels de l’entreprise, ni avec la "sécurité informatique" qui est l’affaire de professionnels de l’informatique en communion totale avec l’ensemble des utilisateurs de l’informatique de l’entreprise, pas plus qu’avec la "protection de l’information" qui est l’affaire de tous les employés de l’entreprise, du patron au dernier des salariés, et doit être conduite (orientation et contrôle) comme une fonction (stratégique) transverse essentielle au sein de l’entreprise.

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