lundi 7 novembre 2022

Information, communication et documentation : une intelligence collective au service de la Politique (22)

 Petit glossaire insolite de l’infocom au service des artisans d’une intelligence collective de documentation à usage politique  

  ÉTAT DE DROIT

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… il faut lutter contre tous les impérialismes autres que celui des citoyens formant peuple, en redonnant de la voix à leurs voix, c’est-à-dire du verbe, un langage, une parole ou la raison (du logos) à la politique.

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    L’État de droit, c’est un système politique qui consacre la prééminence du droit sur le pouvoir. Le concept est généralement associé à la notion moderne de démocratie qui, si l’on se fie littéralement à l’étymologie, devrait être en mesure de mettre le peuple (demos) au pouvoir (cratos).

(retour à l’entrée précédente)

    Le peuple, c’est une population assortie d’une identité ou d’une individualité qui fait son unité. C’est une personne morale assimilée à un individu, sujet à la fois au sens de la grammaire comme au sens politique. Il porte une action exprimée par un verbe associé au pouvoir qu’il est censé exercer, sur un objet (le collectif), mais il est en même temps soumis à une autorité souveraine qui donne tout son sens à la "phrase" politique en lui indiquant une cause dont Thomas d’Aquin, à la suite d’Aristote, nous a rappelé qu’elle était au cœur du travail de la raison dans la construction du savoir[1].

    Dans nos démocraties, le pouvoir, c’est l'État qui en détient les attributs et exerce son autorité sur le nombre, le collectif ou la population, objet de toute son action et objet d’intérêt général, qui fait sa raison d’être ou sa fonction. L’État, en France comme dans bien d’autres pays, c’est la République (Res publica ou Chose publique). C’est le lieu où doit se réaliser cette alliance si précieuse pour la démocratie entre responsabilité individuelle et confiance collective, qui conditionne l’autorité de l’État détenteur du pouvoir, et la souveraineté du peuple.

    Le droit, quant à lui, c’est la souveraineté du peuple qui s’exerce sur l’unité, pour gérer la singularité des individus. Lorsque le droit enfle jusqu’à l’obésité au point de vouloir non plus seulement régner sur l’unité, mais exercer un pouvoir sur le nombre ou la masse, en s’appuyant sur une hiérarchie des normes sans limites lui garantissant une prééminence absolue sur le pouvoir politique, la souveraineté du peuple s’en trouve gravement empêchée, empêchement qui va jusqu’à impacter les libertés individuelles. L’insécurité juridique se substitue en effet alors au droit protecteur des libertés individuelles, et on assiste à un véritable changement de régime consacrant le passage de la démocratie qui met le peuple au pouvoir, à une sorte de nomocratie hissant la norme au pouvoir suprême. Loin d’être l’accomplissement de la démocratie, cette « démocratie par le droit en est sa négation suprême ». « Contre l’impérialisme du droit, il faut redonner de la voix aux voix, c’est-à-dire à la politique », nous dit Pierre-Henri Tavoillot[2]

    En m’inspirant de cette recommandation, je dirais qu’il faut lutter contre tous les impérialismes autres que celui des citoyens formant peuple, en redonnant de la voix à leurs voix, c’est-à-dire du verbe, un langage, une parole ou la raison (du logos) à la politique. C’est là toute l’ambition de mes travaux qui voudraient contribuer à l’avènement d’une nouvelle société de l’information fondée sur l’instauration d’un véritable dialogue démocratique, grâce à l’adoption d’un langage commun dédié à l’organisation d’un espace d’information documentaire à vocation universelle.

(à suivre...)


[1]   Cf. FB, Une nouvelle grammaire cybernétique au service de la politique Tribune, Cercle K2, 25/10/2021.

[2]   Pierre-Henri Tavoillot, "Démocratie par le droit ou démocratie par les voix, il va falloir choisir". Tribune FigaroVox, 18/09/2022.


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